Albert Préjean, fils de distillateurs, passa son enfance à Cloyes dans l'Eure-et-Loir. Il fit ensuite ses études à Nogent-sur-Marne et fut envoyé en pension à Fribourg-en-Brisgau pour y apprendre l'allemand.
Sportif accompli, il pratiqua le vélo, la boxe, la lutte, la course à pied et l'escrime. A vingt ans, la guerre venue, il s'engagea dans l'aviation, brillamment, puisqu'il en sortit avec la croix de guerre et de multiples autres décorations nullement usurpées.
De retour à la vie civile, il effectua différents métiers : ouvrier, vendeur de quinquina, vendeur de lacets de chaussures , cascadeur, jusqu'au moment où, remarqué par Henri Diamant-Berger, celui-ci lui confia un petit emploi proche de la figuration dans ses Trois mousquetaires ou il était la doublure de Pierre de Guingand.
Ce dernier, le prit en amitié et l'aida à obtenir de meilleurs rôles, du moins, mieux rétribués. Contrairement à beaucoup il n'est pas passé par le théâtre, et c'est seulement devant les caméras qu'il fait ses classes. D'ou peut pertre cete absence de prétention et ce naturel qui le firent tant apprécier du public. Son optimisme bon teint, son air de fêtard ahuri rappelant un peu Max Linder.
C'est René Clair qui en fit une vedette avec Paris qui dort en 1924, puis dans Le fantôme du moulin rouge en 1925 ou dans Le voyageur imaginaire en 1926 puis dans Un chapeau de paille d'Italie en 1928 ou il est un excellent Fadinard. Lui succédèrent quelques autres films muets tels que Le Bouif errant de R. Hervil en 26 puis Verdun vision d'histoire en 29 ou Les Nouveaux messieurs, la même année jusqu'au triomphe de Sous les toits de Paris de René Clari, l'un des premiers films sonores dans lequel Albert Préjean poussa d'ailleurs la chansonnette.Ce fut la consécration pour le sympathique comédien qui, à 32 ans, devint la coqueluche des music-halls et des studios tant français qu'allemands il participa a des films tels que Le chant du marin, Un soir de rafle en 1931 et l'opéra de quat'sou de G.W. Pabst.
C'est en effet l'époque des coproductions et Albert Préjean en participa à de nombreuses en tenant simultanément dans ses bras les Françaises Danielle Darrieux et Annabella, et les Allemandes Brigitte Helm et Dita Parlo.
Jeune premier populaire, beau gosse, d'une simplicité naturelle, rival (au cinéma) de Henri Garat, il fit battre le coeur de milliers de midinettes séduites par ce souriant gavroche au physique d'ouvrier "mais qui avait de la classe".Surclassé par Jean Gabin qui a un jeu plus réaliste, il va désormais incarnerdes mecanos, des bons garçons et des détective.
En 1943, la Continental produisit Au bonheur des dames d'après le roman social d'Emile Zola. Ce film lui offrit l'une de ses dernières belles compositions. Albert Préjean - Mouret, génie de la vente, fonde le premier grand magasin de Paris et s'oppose à Michel Simon - le père Baudu, un petit boutiquier dont il provoque la ruine. Le genre d'histoire qu'aime le public de la dernière séance du samedi soir, il est aussi le commisaire Maigret pour Richard Pottier dans Picpus, puis dans Cécile est morte en 44 et dans Les caves du Majestic en 45.
Après la fin de la seconde guerre mondiale, il a la cinquantaine passée, les rôles se raréfient.
Les films deviennent alimentaires et ayant toujours aimé les milieux du cirque, il bifurque vers eux, il tourne cependant en 48 un rôle de patron alcoolique dans Les Fréres Bouquiquant de L. Daquin.
Il devient le Monsieur Loyal du cirque de son ami Jean Richard.
Ce dernier reprendra, plus tard pour la télévision, le rôle du commissaire Maigret qu'avait précisément tenu Albert Préjean, quelque vingt ans plus tôt, dans trois films.
En 1961, il mettra un terme à sa carrière en jouant un dernier film avec Eddie Constantine.
Il fut marié quatre fois. En 1920, avec Augusta Favas qui tourna un film sous le nom de Préjeanne. Ils divorcèrent et se remarièrent une seconde fois en 1937... pour redivorcer.
En 1946, il convole pour la troisième fois : avec la fantaisiste Lysiane Rey de qui il eut un fils, Patrick, lui aussi bien installé dans le métier, et enfin quatrième mariage le 18 octobre 1977 à la mairie du XVIème de Paris avec Jeanne Poché.
On lui connut aussi une liaison avec Annabella qui finit par lui préférer Jean Murat.